Parties de leur village, les rêves plein la tête, certaines de ces femmes se retrouvent dans des conditions exécrables. Reportage !
Parties de leur village pour différentes raisons, ces femmes mettent le cap sur la capitale à la recherche d’une meilleure vie. Mais force est de constater qu’entre les rêves et les réalités de Lomé, le fossé est énorme. Ces femmes errent notamment au grand marché de Lomé, bassine à la main ou sur la tête et s’arrêtant de temps à autre pour proposer leurs services aux potentiels clients. Leurs objectifs, trouver le pain quotidien.
Après une journée de dur labeur assez mouvementée, des allers-retours sans cesse, des insultes venant de toute part sans trouver où poser la tête etc. Avec leur maigre revenu, ces femmes n’arrivent pas à louer une habitation convenable. Elles résident soit dans les taudis situés dans les environs du Grand marché ou dans les quartiers périphériques dans des cabanes de bois.
En effet, le logement reste un véritable hic pour ces femmes portefaix. Les devantures de boutiques, les hangars ou encore les immeubles inhabités et inachevés deviennent leur domicile secours. Après le travail, pour rentrer se reposer, elles doivent attendre que les boutiques ferment d’abord. Par la suite elles dressent à leur devanture, leur lit constitué des cartons et un amas de sacs vieillots. « Je dors devant le marché d’Agbadahonou. Quand je finis ma journée, parfois, je me promène en attendant juste que le marché ferme. Et tout de suite après, je regagne ma place avec mes voisines », confie Amah, une dame de la quarantaine qui semble ne pas se plaindre car déjà habituée. Même son de cloche chez Da Adjo, la trentaine, mère de deux enfants dont le plus jeune vit avec elle. « Je me loge devant Lagos Kpanou (ndrl presque au milieu du grand marché) ainsi que d’autres. Mais pour y aller la nuit nous attendons que les propriétaires des lieux partent. C’est dur mais on s’est habitué à cette vie», affirme-t-elle. Le matin, elles sont obligées de vite libérer les lieux avant que les propriétaires ne débarquent. Adjo, son bébé au dos nous raconte : « Déjà à 04heures du matin, il faut se lever, prendre sa douche avant que les gens n’arrivent ».
En période de pluie l’on se demande à quoi ressemble la vie de ces portefaix qui dorment à la belle étoile? « Quand, il pleut dans la journée avec le sol mouillé, le soir pour dormir, on met les grands plastiques qui servent à couvrir les marchandises, après on met le carton et on se couche dessus. Si la pluie nous surprend en sommeil, nous nous mettons à l’abri sous les tables ou on s’accroupit à côté des marchandises avec nos enfants mais la pluie ne nous rate pas », précise dame Adjo, avant d’ajouter « avec les bandits qui rôdent autour de nous, difficile de dormir profondément. Tu ne peux pas dormir comme cela se doit. Tu dors mais tu as ton esprit sur tes revenues, au risque qu’à ton réveil, tu ne trouves plus rien ».
Maisons des portefaix pour «les riches »
Pour celles qui semblent avoir un peu de moyens, elles habitent dans les locations réservées aux portefaix, dans les environs du grand marché où il faut payer son loyer quotidiennement. « Je vis à la maison des portefaix. On paie 250f voire 300f par jour pour la place et les toilettes », nous renseigne une portefaix.
Dans ces maisons insalubres, la vie n’est pas rose pour les femmes portefaix. Elles sont exposées à plusieurs risques de maladies car vivant dans une insalubrité qui ne dit pas son nom. Dans ces milieux, les abus sexuels sont monnaie courante, la dignité de la femme est bafouée. Elles sont la risée de tous
Malgré cette vie, ces femmes ne se laissent pas abattre. Elles s’arrangent pour envoyer une partie de leur économie à leurs enfants et proches restés au village. « On dort chaque soir, en priant que demain soit meilleur », conclut Amah.
Rolande AWAYITOU