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Grossesses en milieu scolaire : La question de l’impunité des auteurs

Au Togo, la lutte contre les grossesses précoces en milieu scolaire peine à porter ses fruits. En dépit des efforts des Organisations de la Société civile, du gouvernement et des Institutions internationales, il existe toujours des porches de résistance face à ce phénomène qui constitue un danger pour l’éducation des filles. Les statistiques donnent le tournis et les témoignages sont saisissants.

entre les années 2009 et 2013, 12 343 cas de grossesses ont été enregistrés en milieu scolaire. Pour la seule année scolaire 2012-2013, ce sont 7000 cas qui ont été signalés. 3000 grossesses en milieu scolaire ont été recensées en 2018, selon les données recensées auprès des organisations de la société civile.

Selon le ministère de l’Action sociale, entre les années 2009 et 2013, 12 343 cas de grossesses ont été enregistrés en milieu scolaire. Pour la seule année scolaire 2012-2013, ce sont 7000 cas qui ont été signalés. 3000 grossesses en milieu scolaire ont été recensées en 2018, selon les données recensées auprès des organisations de la société civile.

De nos jours au Togo, de nombreuses jeunes filles scolarisées tombent précocement enceintes. Ces grossesses résultent des facteurs liés notamment à leur situation de vulnérabilité, car celles-ci sont en relation entre l’environnement social et scolaire. Certaines d’entre elles sont victimes d’atteinte et de pressions à caractère sexuel de la part des individus qui profitent de leur manque de maturité. En outre l’éducation sexuelle au sein des familles et à l’école n’est pas suffisamment développée. La sexualité demeure un sujet tabou. Les auteurs de ces grossesses sont souvent issus de l’environnement des élèves.

La scolarisation de la jeune fille en danger

Les risques liés aux grossesses précoces sont multiples. La déperdition scolaire, les effets psychologiques, la marginalisation, les décès liés aux complications de la grossesse et de l’accouchement, les séquelles liées aux avortements clandestins. « Je suis tombée enceinte par ignorance en classe de 3ème  », regrette Kady., ancienne élève d’un groupe scolaire privé à Baguida. Contrainte d’abandonner les classes à cause de cette grossesse précoce, elle est actuellement couturière. Elle confesse avoir perdu sa virginité au cours de cet acte sexuel qui a occasionné cette grossesse prématurée. Comme elle, des centaines d’élèves filles sont déscolarisées chaque année pour la même cause.

Les statistiques sur la période 2013-2016 révélées par le chef section vie scolaire à l’inspection de l’enseignement secondaire général de Kpalimé, M. Wokadan Kossi présentent les cas de grossesses dans la circonscription pédagogique incluant les préfectures d’Agou et de Kloto. « Au 1er cycle du secondaire de l’année 2013-2014, il y a eu 81 cas de grossesses dont 24 ont poursuivi les cours dans leur état, 57 ont abandonné les cours et 3 ont avorté. Au 2ème cycle du secondaire, on a dénombré 19 cas de grossesses dont 10 ont poursuivi les cours, 7 ont abandonné et 2 cas d’avortement. Au cours de l’année scolaire 2014-2015, il a été dénombré 21 cas de grossesses en 6ème, 23 cas en 5ème, 50 cas en 4ème et 38 cas en 3ème. 13 cas en Seconde, 28 en Première et 14 en Terminale. Au cours de la même année, 12 ont poursuivi les cours, 23 ont abandonné et 10 ont avorté. Au cours du 1er trimestre de l’année 2015- 2016, 13 cas de grossesses ont été dénombrées en 6ème, 12 en 5ème, 25 en 4ème, 21 en 3ème, 7 en 2nde, 5 en 1ères et 14 en Terminales », a indiqué M. Wokadan Kossi. « Chaque année, ce sont plus d’une centaine de jeunes filles qui tombent enceinte au cours de leur cursus scolaire et ce, malgré les campagnes de sensibilisation», se désole Hervé Baini, responsable Jeune à l’Association togolaise du bien-être familial (ATBEF).

A en croire une source non gouvernementale, le manque d’informations sur les conséquences de ces comportements sexuels à risque, le gain facile, l’absence de repères et le suivisme en sont les raisons, premières. Il y a aussi, l’utilisation abusive des technologies numériques notamment des réseaux sociaux, des informations partagées par divers programmes audiovisuels, la pauvreté, la démission de certains parents, l’absence du dialogue entre les parents les enfants et la qualité de construction de la vie en communauté sont aussi des causes du mal. Awa C., 17 ans, en classe de Première et mère d’un bébé raconte « Mes parents ne sont plus ensemble. Je suis avec mon papa, un mécanicien. Il ne reste souvent pas à la maison. J’en profite pour faire mes loisirs. Faute de moyens pour subvenir à mes besoins, je sollicite l’aide des ami(e)s. C’est très compliqué. C’est dans cette condition que j’ai dû laisser l’école au début de l’année scolaire 2018-2019, quand j ‘étais tombée enceinte», témoigne-t-elle avec tristesse.

L’impunité des auteurs…

Les sanctions prévues vont de 6 mois à 3 ans d’emprisonnement et d’une amende de 200000 à 500000 FCFA pour certaines infractions et de 1 an à 5 ans d’emprisonnement et de 500000 à 1000000 FCFA d’amende pour des tentatives d’avortement.

Pour sécuriser l’avenir des jeunes filles lors de leur cursus scolaire, le législateur togolais avait trouvé une solution : la loi du 16 Mars de 1984. Elle lutte contre les grossesses en milieu scolaire et donc protège les jeunes filles élèves et apprenties. Elle sanctionne quiconque entretient des relations sexuelles avec un (e) élève ou un (e) apprenti en formation. La loi sanctionne également les avortements, les tentatives d’avortement.

Les sanctions prévues vont de 6 mois à 3 ans d’emprisonnement et d’une amende de 200000 à 500000 FCFA pour certaines infractions et de 1 an à 5 ans d’emprisonnement et de 500000 à 1000000 FCFA d’amende pour des tentatives d’avortement.

La plupart du temps, des autorités hiérarchiques directes ont tendance à protéger les collègues indélicats », regrette ce directeur.

Selon un ancien Directeur d’école à la retraite, c’est le refus par l’administration d’appliquer la législation scolaire et pénale en la matière qui fait perdurer le mal. Selon lui le pire, c’est quand un enseignant devient un bourreau. «Parfois les professeurs, qui sont censés protéger et guider les élèves, oublient leur mission d’éducateur», a-t-il expliqué. Malheureusement, ces dérives graves dans le système éducatif au Togo sont souvent restées impunies. « La plupart du temps, des autorités hiérarchiques directes ont tendance à protéger les collègues indélicats », regrette ce directeur. Pour lui, c’est l’administration elle-même qui se met devant pour proposer aux parents dont leurs enfants en sont victimes, une solution à l’amiable, consistant souvent à déscolariser une fille et la contraindre dans une vie maritale ou de ménage. Cela se passe sans aucune gêne », a-t-il soutenu.

Pour ce directeur, les enseignants véreux devraient être révoqués d’urgence pour décourager ce comportement. Toutefois, il fait savoir qu’il est difficile de savoir qu’un professeur est un « loup au milieu des brebis ».

En 2018, L’Association togolaise pour le Bien-être familial (ATBEF) avait lancé un projet basé sur des mécanismes de dénonciations des auteurs de ces grossesses devant la justice pour que des sanctions soient prises pour décourager d’autres prétendants. Mais que nenni. Le problème persiste. Aujourd’hui, des voix s’élèvent pour appeler les directeurs d’écoles, les enseignants, les élèves et les parents d’élèves à une prise de conscience.

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