Le rôle néfaste que jouent les trafiquants des espèces en voie d’extinction a amené les différents gouvernements du Togo, non seulement à établir des textes juridiques sanctionnant le trafic illicite des espèces protégées, mais également à ratifier plusieurs accords internationaux afin de protéger les espèces en voie d’extinction animale, végétale et marine.
Pourtant, les trafiquants passent toujours par tous les moyens pour faire des transactions illégales des produits dérivés des espèces en voie d’extinction. Et, la justice n’est pas en reste, elle est aussi en croisade contre la criminalité faunique, mais lorsque les trafiquants sont appréhendés et que la peine n’est pas tout à fait dissuasive, cela ne peut qu’amener les trafiquants à faire du Togo, une plaque tournante du trafic illicite et illégal des espèces en voie d’extinction.
En effet, le 14 avril 2021, les agents de l’Office Central de Répression du Trafic Illicite des Drogues et de Blanchiment (OCRTIDB) et du Ministère de l’Environnement et des Ressources Forestières (MERF) en collaboration avec EAGLE-Togo, ont arrêté à Lomé, trois présumés trafiquants en possession de six défenses d’éléphants.
Ces trafiquants ont été mis sous mandat de dépôt le 20 avril 2021, après avoir été placés en garde à vue puis présentés au procureur et reconnu les faits à eux reprochés.
Le 11 juin dernier, les nommés BOUKARI Alassani, IDRISS Ali et TAMPALI Mamadou, ont été condamnés à six mois de prison avec quatre mois de sursis pour détention, circulation et commercialisation illégale de produits fauniques.
Une décision pas trop dissuasive, lorsqu’on se réfère à des sanctions juridiques liées au même cas de crime faunique dans d’autres pays voisins comme le Bénin.
Pourtant, le nouveau code pénal du Togo, dans son volet environnement renforce la protection de la faune et la flore. L’article 761 de ce code dispose : « La destruction et la commercialisation, directe ou indirecte, sans droit d’espèces animales ou végétales protégées en vertu des dispositions législatives et réglementaires en vigueur et des conventions internationales auxquelles la République du Togo est partie est punie d’une peine d’un à cinq ans d’emprisonnement et d’une amende d’un million à cinquante millions sans préjudice de toute autre disposition du présent code ».
L’absence ou la faible application de la loi encourage le trafic illégal d’espèces sauvages qui devient alors une alternative aux autres crimes, comme le trafic d’armes de stupéfiants ou la traite des êtres humains.
En effet, au Bénin, il n’y a pas longtemps, le tribunal de Natitingou par jugement, a condamné un trafiquant de deux défenses d’éléphant, espèce intégralement protégée, à 48 mois d’emprisonnement ferme. Il doit payer en plus une amende de 300.000 FCFA et une somme de 3.000.000 FCFA pour les dommages et intérêts. Par contre au Togo, pour ce même fait, avec plus de défenses d’éléphant, au total six défenses d’éléphant, la justice a condamné les trafiquants à six mois de prison avec quatre mois de sursis pour détention.
En janvier dernier toujours au Bénin, le Tribunal de Première Instance de Parakou a condamné deux trafiquants de deux défenses d’éléphant à 60 mois d’emprisonnement. Ils sont ensuite condamnés à verser une amende de 500.000 FCFA et à payer la somme de 2.000.000 FCFA pour dommages-intérêts. C’est la preuve que la justice tient toujours rigueur à la « tolérance zéro » pour toute personne qui se met dans la logique de destruction du patrimoine faunique.
Au Togo, l’article 761 du nouveau code pénal est bien clair, mais on constate souvent que les juges appliquent plutôt l’article 796 de ce même code: « Quiconque fait circuler, vend, importe, exporte ou fait transiter le animaux sauvages, vivants, des trophées sans autorisation est puni d’une peine d’emprisonnement d’un à six mois et d’une amende de cent mille à cinq cent mille francs CFA ou de l’une de ces deux peines ».
Ce qui fait qu’on constate une ampleur de cas de crime faunique. A Lomé, le Tribunal de Première Instance, avait condamné en janvier 2021, les nommés BOUYO Essozimna, GAGNON Kodjo, ASSIH Manèyassouwé, ZODOGADJI Grégoire et AYAVI Koffi Agossou pour commerce illégal de trois grosses défenses d’éléphant.
A titre de dommages et intérêts, ils ont été aussi condamnés à payer solidairement une somme de 5 millions de francs CFA, à la partie civile qu’est le Ministère de l’Environnement et des Ressources Forestières (MERF). DAGLO Kossi (grand féticheur), a été relaxé, car les faits selon le juge, n’étant pas constitués à son égard. AYAVI Koffi Agossou de nationalité béninoise, a été condamné à six mois de prison dont deux mois de sursis et à payer une amende de 300.000 francs CFA, ASSIH Manèyassouwé, lui a été condamné à six mois de prison dont trois mois de sursis et à payer une amende de 100.000 francs CFA et les trois autres ( ZODOGADJI Grégoire de nationalité béninoise, BOUYO Essozimna et GAGNON Kossi, tous de nationalité togolaise), ont été condamnés à six mois de prison dont deux mois de sursis et à payer une amende de 200.000 francs chacun.
Signalons que les décisions dissuasives participent à la lutte contre la criminalité faunique et à la protection du patrimoine faunique pour lequel les ONG Internationales dont EAGLE-Togo, ne cesse de renouveler son accompagnement technique au gouvernement pour redonner espoir à la survie des espèces menacées d’extinction.
Si la main du juge devient lourde et qu’on applique des sanctions plus exemplaires, comme c’est le cas dans d’autres pays comme le Bénin, les trafiquants vont plusieurs fois réfléchir, avant de vouloir commettre à nouveau leurs forfaits de criminalité faunique quels qu’ils soient.
Il est donc évident que lorsque les auteurs de crimes liés aux espèces sauvages courent moins de risques de se faire arrêter au Togo, ils ne peuvent que refaire de ce pays aujourd’hui, un paradis pour les grands trafics des espèces sauvages protégées. Car, ils n’auront qu’une seule chose dans la tête, c’est être relativement condamnés à des peines clémentes.
Rappelons que le trafic illégal d’espèces sauvages considérées comme un atout important par beaucoup de communautés, détruit les richesses naturelles. La justice doit toujours sévir afin de dissuader d’autres éventuels criminels fauniques.